BLOG DE PHACO vous parle de FAUSSE NOTE

6 Nov 2021

BLOG DE PHACO vous parle de « FAUSSE NOTE »

Au Théâtre de la Contrescarpe, sous la forme d’un thriller psychologique haletant, Didier Caron et Christophe Luthringer mettent en scène Fausse note, spectacle imprégné de noirceur et d’humanisme.
Le début du spectacle se profile sur le ton de la comédie et du boulevard. À la fin d’un concert problématique, un chef d’orchestre, H.P Miller, rentre dans sa loge énervé. Un de ses admirateurs, un certain monsieur Dinkel, rentre dans sa loge, lui demandant admiratif et plein de respect un autographe. Puis au fil du spectacle ce personnage devient de plus en plus incisif, voire inquiétant. Habile et toute en progression la mise en scène nous tient en haleine.

Qui est cet huberlulu ? Quel est le véritable but de cette visite ? S’agit-il d’un fan éconduit, un de ces givrés de la trempe de David Chapman, prêt à tuer gratuitement pour se venger à la suite de multiples frustrations sur une célébrité locale ? Fausse note est un spectacle à multiples pistes. Sans révéler les aboutissements de ce drame psychologique l’on signalera que le cadre servant de réflexion à l’histoire de Fausse note est les camps de concentration. Au-delà des relents de la Seconde Guerre mondiale la pièce propose une réflexion vive sur le sens aigu de la responsabilité et en particulier sur le lien immoral de soumission entre père et fils.

Les explications confuses du chef d’orchestre pour atténuer sa responsabilité face aux ordres criminels de son père nazi ne convainc pas plus que les multiples stratagèmes mis en place par le prétendu monsieur Dinkel pour approcher l’ancien bourreau de son père. Subtilement, ce spectacle évoque à la fois le désir de vengeance des victimes et la possibilité de rédemption des bourreaux. Dans ce rôle de chef d’orchestre prestigieux et hautain frappé de plein coeur par la menace et la révélation de sa part inconnue, Pierre Azema se révèle un comédien brillant et inventif. Dans ce rôle de personnage rongé par le souffrances accumulées et les fantômes du passé, Pierre Deny s’avère tout aussi excellent dans un jeu réaliste et victimaire.

Interprété par un duo théâtral particulièrement rodé, ce jeu à la fois trouble et expressif s’apparente à un combat que se livrent deux boxeurs/gladiateurs dont l’enjeu serait la réécriture et la repossession de leur propre histoire. Le spectacle en tout cas – au climat philosophique et oppressant – dégage beaucoup d’émotion ! On ajoutera aussi que le texte de Didier Caron n’est ni moralisateur ni larmoyant. Comme par exemple dans Le Petit Coiffeur ou Adieu Monsieur Hoffmann de Jean-Philippe Daguerre Didier Caron parvient dans l’écriture théâtrale de Fausse note à trouver un juste équilibre entre la dénonciation des horreurs de la guerre et ses propres aspirations humanistes.